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Choisis la vie... (Deutéronome 30,19)

Choisis la vie !

Choisir la vie... c'est curieux, car la vie, c'est ce qu'on ne choisit pas. Et, le « choisis la vie », est aussitôt assorti de « pour que tu vives ». Il ne s'agirait donc pas simplement de venir au monde, il y a autre chose. Ce que Dieu demande, ce n'est pas de vivre, mais de « choisir » la vie. Il n'est pas question de vivoter, mais de se tourner résolument vers la vie. Notre choix naturel ne nous y conduit pas, comme si une force sourde nous tirait du côté obscur, de ce qui nous tue intérieurement, psychiquement, spirituellement. On croit vivre, mais bien trop souvent on ne fait que subsister. Mais le Dieu de la Bible dit « choisis la vie ! ». L'appel est étonnant car dans la Bible, le choix est le propre de Dieu ; il ne s'agit donc pas d'une mince affaire !

De la difficulté de choisir, vivre, c'est choisir

L'homme est le seul être à posséder cette faculté, qui est réservée à Dieu. Le choix est donc entre nos mains. La question qui se pose, c'est qu'est-ce qu'être vivant ? Nous sommes vivants de nos choix, de nos orientations. Dieu nous guide, mais au bout du compte nous sommes libres, et donc en situation de responsabilité ! Nous ne sommes pas des jouets entre ses mains. Pourtant nous avons tous fait l'expérience de la difficulté du choix. Malgré cela je suis persuadée que choisir c'est vivre, rejoignant ainsi Hamlet : être ou ne pas être, voilà la question ! Choisir, je dirais même plus, consentir à la vie, engage toute notre existence. Nous sommes condamnés à faire le choix des forces de vie sur les forces de mort, à combattre les forces négatives, parce qu'il y a en nous, dans le monde, une volonté de destruction et donc la possibilité de revenir en arrière, au chaos.

Choisir la vie... pas si simple ! D'autant que le contexte dans lequel s'inscrit cet appel est choquant lorsque l'on a été bercé par la théologie de la grâce. La difficulté du choix est renforcée par la relation entre le choix et l'obéissance à la loi.

Quelle loi ?

Ici, le critère de l'obéissance, ou de la désobéissance à la loi, est en lien avec le bonheur ou le malheur. L'obéissance à la loi comme voie du bonheur : quel comble pour des protestants ! Pourtant, ne nous trompons pas, il existe une grande diversité de conceptions de la loi, de son contenu et de ses exigences. Ici, celui qui parle se présente comme Dieu qui libère. Jamais il ne dit : « je suis le créateur du ciel et de la terre », ou : « c'est moi qui t'es fait », non il rappelle une seule chose : il a fait sortir le peuple d'Egypte, du pays de la servitude ! Ainsi le chemin qu'il propose, la loi qu'il offre, ne saurait nous enfermer, mais nous libérer. Et, à y regarder un peu plus dans le contexte du Deutéronome, la loi a une orientation bien particulière : dans le cadre de l'alliance il s'agit d'aimer Dieu qui nous aime. Cela se traduit par ce qui peut être entendu comme un leitmotiv, le commandement d'amour de Dieu est, tout au long du livre, un rappel de l'esclavage et de ses conséquences. Il signifie également aimer l'étranger, l'autre, le différent, ne pas l'enfermer comme nous avons été enfermés, car toute la loi s'inscrit sur cette expérience, cette école : celle de l'esclavage et de la libération.

Choisir la vie... pas si simple ! Tout cela est tout de même difficile; et Dieu le sait. Il prend en compte que nous sommes humains, que nous avons la possibilité de nous tromper c'est juste ce qui précède cet appel au choix dans ce chapitre de Deutéronome 30, et que l'on peut entendre aussi comme loi : l'appel au repentir.

Le repentir

Le repentir, ce n'est pas le regret, mais un retournement, une véritable conversion, il s'agit du même verbe en hébreu. Le repentir comme loi, c'est aussi idiot que de commander d'aimer. Comment peut-on faire d'une démarche intérieure une obligation ? Car, la loi biblique ne s'arrête pas à la porte de l'intimité de l'individu, elle n'est pas un code de bonne conduite, de bonnes relations humaines. Elle fournit à l'homme des directions. Le repentir, c'est la possibilité de revivre de « re » commencer, même si nous nous sommes trompés, même si nous sommes meurtris. C'est d'ailleurs après l'insupportable que le texte biblique est écrit pour nous dire comment à partir de deux catastrophes : l'exil pour les hébreux, la croix pour les premiers disciples, des renaissances ont pu se produire. Choisir la vie c'est aussi être capable de continuer à vivre alors que tout semble perdu, quelle qu'en soit la cause, en regardant les deux chemins, car ils sont là. Et en choisissant la vie.

C'est ce que le Dieu nous offre. Lui, le Dieu qui prend le risque de choisir la vie. C'est le sens de la venue de Jésus : Dieu prend le risque de la vie humaine pour nous la restituer. Il est Celui qui vient nous redire : je t'en supplie, je te le demande comme mon désir ultime : choisis la vie...

...pour que tu vives !

Florence Blondon