Skip to main content
56, avenue de la Grande-Armée, 75017 Paris

Conversion, repentance, pénitence et consolation

par Louis Pernot (décembre 09)

 

Pour accueillir le temps de Noël, Jean Baptiste nous dit : « convertissez-vous » ou « repentez-vous ». Qu’est-ce à dire?
 

1. Se convertir.

Cela ne signifie pas dans la Bible de changer de religion, mais recouvre une démarche spirituelle à faire pour chacun dans sa religion. Le mot, en grec, comme en hébreu signifie : « faire demi-tour » (comme à ski), « changer de direction », « reconnaître qu’on s’est éloigné de Dieu et y retourner ».

« Se tourner vers », est une démarche fondamentale, ce vers quoi l’on se tourne, est même plus important que là où on est. C’est le massage du salut par la foi : la foi c’est ce vers quoi nous nous tournons, ce en quoi nous croyons, c’est notre visée, et c’est ça qui compte, plus que ce que nous parvenons concrètement à faire ou à être.

Nous sommes invités donc à changer notre façon de voir, plus qu’à obéir à une loi morale, reconnaître qu’on s’est détourné pour retourner à Dieu. Et cela, ce n’est pas une fois dans sa vie qu’il faut le faire, mais sans cesse.
 

2. Se repentir.

Le sens de l’action de Jean-Baptiste précise les choses : il faut reconnaître son péché, le « confesser ». Ce mot signifie : « reconnaître publiquement », reconnaître sa faute, son imperfection, la regarder en face, et ce devant Dieu et devant ses frères. Vouloir recevoir le pardon, aspirer au pardon. Pardon que Jean-Baptiste annonçait et formalisait par l’immersion dans l’eau du Jourdain. Ce geste, là encore n’était pas nécessairement fait une fois pour toutes, mais comme tout rite d’ablution pouvait être répété.
 

3. Faire pénitence.

Ca, c’est ce que l’on entend dans la version latine de la Bible qui traduit « repentez vous » par « paenitentiam agite ».

Or tout le monde pense que le mot « pénitence » vient de « poena » qui signifie la « peine », la « punition ». Comme si avouer sa faute était en accepter la punition, ou faire des actes de contrition, d’auto-punition. On croit entendre là des notions de punition, de vengeance, de prix à payer pour obtenir le pardon. Mais c’est une erreur. D’abord par rapport au sens du texte : Jean Baptiste ne demandait aucun geste de pénitence autre que de reconnaître sa faute et d’accepter la grâce. Et c’est faux aussi à partir de l’étymologie du mot : si toutes les version latines aujourd’hui écrivent pénitence en latin : « poenitentia » avec un « o », dans les textes anciens : cela ne s’écrit pas avec un « o », mais avec un « a », « pænitentia ». La « pénitence » ne vient donc pas de « poena » la punition, mais de « pæne » qui signifie « à peine » , « presque ».

Il s’agit donc de reconnaître qu’on n’a pas été tout à fait ce qu’on aurait dû être, reconnaître un manque de quelque chose, plus qu’un excès de défauts. Cela doit nous inciter à nous ouvrir à Dieu, à aspirer à Dieu, faire de la place pour accueillir son don, reconnaître notre manque, notre besoin de Dieu,

C’est précisément le sens de la prédication de l’Avent : apprendre à accueillir Dieu, ouvrir une route, préparer le chemin du Seigneur. Et cela, non pas en s’appuyant sur sa culpabilité, ni même sur ses qualités, mais en prenant ses manques et ses aspirations comme source de dynamisme.

S’appuyer sur un vide, sur un manque, c’est sortir de soi pour aller en quête vers l’autre, vers Dieu et vers les Autres. Les Béatitudes le disent aussi : « heureux les pauvres en esprit », « heureux ceux qui ont faim et soif... »

4. Quatrième sens caché :

 La « repentance » en hébreu se dit par deux mots : l’un est « Shouv » qui signifie « tourner », « retourner », nous l’avons vu, et l’autre est « Naham » qui signifie bien « se repentir », « regretter », mais aussi, et c’est curieux : « consoler ». C’est précisément ce mot qui se trouve en tête du chapitre 40 d’Esaïe qui est utilisé pour parler de Jean Baptiste : la « voix qui crie dans le désert » est introduite par cet appel : « consolez, consolez mon peuple ». C’est là l’une des plus belle expression de la grâce. Il n’y a pas de menace, il n’est pas dit : « convertissez-vous si vous voulez être pardonnés » ou « convertissez-vous » sinon vous serez punis, mais le pardon est premier.

Avant de dire « convertissez-vous », il faut dire : « vous êtes pardonnés ». Avant de vouloir convertir, il faut d’abord consoler et encore consoler, réconforter.

Jean-Baptiste d’ailleurs a un nom qui va dans ce sens. Son nom : « Io Hannan » signifie : « Dieu fait grâce ». Tout cela prépare les chemins du Seigneur : 1 Ne pas rester les deux pieds dans ses problèmes. 2. Ne pas vouloir non plus s’en sortir tout seul, accepter d’avoir besoin des autres et de Dieu. Oui, pour pourvoir accueillir le Christ, pour pouvoir vivre vraiment Noël comme une expérience personnelle, il faut se convertir, reconnaître avoir besoin d’aide, et savoir que Dieu est à la fois le but et le secours pour aller à ce but.

 

 

Louis Pernot